République démocratique du Congo : condamnation à mort à la suite d’un procès inéquitable

Joseph Mwamba Kkongo est l’une des nombreuses personnes condamnées à mort chaque année par la République démocratique du Congo (RDC), État africain rétentionniste. Bien que la RDC n’ait exécuté aucune personne depuis 2003, elle continue de condamner régulièrement des personnes à la sanction capitale. Depuis décembre 2021, M. Mwamba fait partie des plus de 500 personnes détenues dans le couloir de la mort et attend désormais son exécution, sans en connaître la date.

Le 25 décembre 2021, M. Mwamba a tué sa femme sur le marché de la commune de Matete à Kinshasa. Avant même sa verbalisation, des policiers et des passants l’ont violemment battu devant l’indifférence d’autres policiers présents. Par la suite, la police l’a arrêté et conduit au poste le plus proche tandis que le Parquet a demandé au président du Tribunal de grande instance de Kinshasa/Matete de convoquer une audience en flagrance.

Jugé le 28 décembre 2021 devant le Tribunal de grande instance de Kinshasa/Matete, soit trois jours après son arrestation, M. Mwamba n’a pas bénéficié de conditions équitables pour son procès. En violation du principe du contradictoire, le temps de parole accordé aux avocats de la partie civile a largementexcédé celui de leurs homologues de la défense. Le procès s’est achevé par la condamnation à mort de M. Mwamba par les juges.

Joseph Mwamba est depuis lors placé en détention dans la prison centrale de Makala et son état de santé s’est détérioré de manière préoccupante. Bien qu’il soit possible que les policiers l’aient torturé au moment de sa garde à vue, aucune visite à un médecin ne lui a été proposée. Plus généralement, et à l’image de nombreuses autres personnes détenues au sein de cette même prison, il dispose d’un accès aux soins médicaux et à l’alimentation insuffisant, ce qui entraîne une rapide dégradation de son état de santé. Enfin, cette précarité sanitaire se double de l’insécurité psychologique qu’implique une longue attente dans le couloir de la mort. Cette situation d’attente est vraisemblable puisque la RDC observe un moratoire depuis 2003, ce qui met particulièrement en lumière le caractère inhumain de la peine de mort. Dans ce pays, une personne condamnée à mort vit de longues années avec la sensation d’une mort imminente.

Sources : ACAT RDC


Ce que nous demandons

  • de commuer la condamnation à mort de Joseph Mwamba Kkongo ;
  • de réviser le procès de Joseph Mwamba Kkongo en lui garantissant des conditions équitables, en particulier en ce qui concerne le respect du droit de la défense et du principe du contradictoire ;
  • d’améliorer les conditions de détention de Joseph Mwamba Kkongo, notamment afin qu’il puisse bénéficier d’un accès aux soins et à une alimentation satisfaisante, ainsi que d’un suivi médical adapté aux actes de torture subis ;
  • enfin, et pour mettre fin à la situation problématique de l’attente intolérable dans le couloir de la mort, d’arrêter de prononcer la peine de mort en République démocratique du Congo et ainsi de se conformer à sa volonté affichée sur le plan international de ne plus procéder aux exécutions.

Complément d’informations

Le fait que la justice congolaise n’ait pas garanti l’équité du procès de M. Mwamba est incompatible avec plusieurs des engagements internationaux du pays. La RDC est partie au Pacte relatif aux droits civils et politiques depuis 1976. L’Observation générale n°36 du Comité des droits de l’Homme des Nations unies sur le droit à la vie précise par ailleurs que si les États parties ne sont pas tenus d’abolir la peine de mort, ils doivent garantir les conditions d’un procès équitable. C’est ce que rappelle également l’Observation générale n° 3 sur l’article 4 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples à laquelle la RDC est partie depuis le 28 juillet 1987. Au regard des droits international et régional, la condamnation à mort de M. Mwamba est invalidée de fait. De plus, la longue attente anxiogène d’une exécution à une date encore inconnue expose le condamné au risque de développer un syndrome du couloir de la mort, dont le Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et les conditions de détention avait indiqué en 2012 qu’il pouvait produire de graves traumatismes mentaux voire des souffrances physiques, en violation de l’interdiction de la torture qui s’applique à la RDC.

Si les faits de tortures lors de sa détention au poste de police sont avérés, M. Mwamba aurait alors dû recevoir des « des soins médicaux appropriés » de la part de l’État congolais, en vertu de l’article 50§A des Lignes directrices de Robben Island, conçues afin de garantir la bonne application de l’article 5 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, qui stipule que tout individu a le droit au respect de sa dignité. Or, l’État ne lui en a proposé aucun.

En ce qui concerne ses conditions de détention, l’État congolais est également en inadéquation avec ses engagements internationaux, en particulier la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à laquelle il est partie depuis 1996. Effectivement, la précarité de ces conditions de détention constituent un traitement cruel, inhumain ou dégradant au regard de l’article 16 qui stipule que « Tout Etat partie s’engage à interdire dans tout territoire sous sa juridiction d’autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas des actes de torture telle qu’elle est définie à l’article premier lorsque de tels actes sont commis par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel, ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. ». Finalement, l’accès insuffisant de M. Mwamba à l’alimentation et aux soins viole respectivement les règles nos 22 et 24 de l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus, dites « Règles Mandela ».

En dépit d’avoir commis un acte qualifiable de féminicide qu’il importe de dénoncer et condamner, il est essentiel que l’État congolais commue la condamnation à mort de Joseph Mwamba Kkongo qui, en plus de n’avoir pas eu le droit à des conditions équitables pour son procès, est victime de la torture que constitue l’attente dans le couloir de la mort. De même, la juridiction de Matete doit désormais assurer des conditions équitables aux procès qu’elle mène, notamment en ce qui concerne le respect du droit de la défense et le principe du contradictoire. Enfin, la commutation de sa peine devrait être accompagnée d’une amélioration des conditions de détention, notamment afin de bénéficier d’un accès aux soins et à une alimentation satisfaisante ainsi que d’un suivi médical adapté aux actes de torture subis.

Sources : ACAT-RDC

Pour plus d’informations sur les couloirs de la mort en RDC, lire l’enquête de 2019 de ECPM (Ensemble contre la peine de mort) : « Vers une mort en silence », sur leur site Internet www.ecpm.org


La lettre est adressée au
Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo
Palais de la Nation
Av. du roi Baudouin
Kinshasa – Gombe
BP 201 Kin 1
République démocratique du Congo

Timbrez à 1.40 €

Copie à l’Ambassade :
Ambassade de la RD Congo
30, rue Marie de Bourgogne,
1000 Bruxelles, Belgique
Mail : secretariat@ambardc.eu

Timbrez à 1,05 €

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