Catéchisme catholique : enfin un non catégorique à la peine de mort !

Enfin un NON catégorique à la peine de mort
dans le catéchisme universel de l´Église catholique !

 

Historique du plaidoyer des ACAT pour une prise de position claire de l’Eglise catholique contre la peine de mort

Le 11 octobre 2017, Le Pape François demandait expressément la révision du Catéchisme universel de l’Église catholique sur la peine de mort, estimant que « la peine de mort est une mesure inhumaine qui blesse la dignité personnelle ». La Congrégation pour la Doctrine de la Foi procédait alors à la modification de l’article 2267 du Catéchisme, qui, désormais donc, stipule le rejet total de cette pratique. La nouvelle rédaction du texte en vigueur depuis août 2018 est la suivante : « L’Église enseigne, à la lumière de l’Évangile, que la peine de mort est une mesure inadmissible car elle attente l’inviolabilité et la dignité de la personne et elle s’engage de façon déterminée, en vue de son abolition partout dans le monde ». (1)

Le Pape François a fait ainsi inscrire pour la première fois dans le catéchisme de l’Église catholique une opposition catégorique à la peine de mort, de plus il a appelé l’Église à s’engager pour abolir cette peine partout dans le monde.

Les deux Papes précédents avaient en leur temps certes appelé à l´abolition de la peine de mort. Jean Paul II avait bien saisi l’occasion d’un voyage aux États-Unis pour appeler à l’abolition de la peine capitale en 1999. Benoît XVI avait parlé de « la nécessité de faire tout ce qui est possible pour arriver à l’élimination de la peine capitale ».
Mais aucun d’eux n´avait demandé une reformulation de l´article 2267 qui alors stipulait que « L’enseignement traditionnel de l’Église n’exclut pas, quand l’identité et la responsabilité du coupable sont pleinement vérifiées, le recours à la peine de mort, si celle-ci est l’unique moyen praticable pour protéger efficacement de l’injuste agresseur la vie d’êtres humains. » (2)

La réécriture du catéchisme voulue par le Pape François ne pouvaient que réjouir FIACAT et ACAT qui mènent avec détermination le combat abolitionniste partout dans le monde (3). À maintes reprises, avec insistance et persévérance, nous nous étions adressés au Saint Siège comme à divers responsables ecclésiaux exprimant nos regrets et notre inquiétude devant l’ambigüité que pouvait susciter l’absence de condamnation radicale de la peine de mort dans le livre d’enseignement officiel des principes de foi de l’Église catholique, que constitue le catéchisme .

Sans vouloir donner une image exhaustive des nombreuses démarches FIACAT-ACAT au cours des années, nous pouvons citer plusieurs étapes qui ont marqué notre action auprès des responsables de l’Église catholique.

En 1987, Jean Paul II accordait une audience à une délégation FIACAT – ACAT (4). La FIACAT venait alors de voir le jour. Au cours de l’entretien qui durait plus d’une demi-heure, le seul sujet évoqué, en dehors de la présentation de notre ONG internationale et de ses associations affiliées, fut celui de la peine de mort. Mais à la demande de la FIACAT d’un engagement fort de l’Église catholique contre cette peine, le pape évoquait longuement l’Église universelle qui devait tenir compte des sensibilités de chaque région du monde et en particulier de celle des africains qui, en la matière, seraient en désaccord avec nous.

En 1991, lors du Conseil international de la FIACAT au Luxembourg, il était décidé que la FIACAT interviendrait auprès de la Commission du Vatican chargée de la rédaction du futur Catéchisme pour exiger la modification des dispositions concernant la peine de mort, et notamment la suppression du mot “légitime”. Chaque ACAT était également chargée d’interpeller les responsables de l’Église catholique dans son pays à ce même sujet (5).

Malheureusement, ce Catéchisme paraissait en 1992, avec le texte reconnaissant la légitimité de la peine de mort (6).

Une nouvelle version corrigée du Catéchisme était publiée le 13 octobre 1998. Cette formulation représentait un très léger progrès par rapport à la précédente, mais maintenait l’affirmation selon laquelle la peine de mort restait nécessaire dans des situations très précises et exceptionnelles en vue de la sauvegarde du bien commun. La FIACAT intervenait alors de nouveau auprès du Vatican à l’occasion de son Conseil international de novembre 1998 à Paris pour insister sur l’incohérence de cette position, et invitait les ACAT à agir à leur tour.

A la cérémonie de clôture du Congrès mondial contre la peine de mort, le 26 février 2010 à Genève, le représentant du Saint Siège soulignait l´enseignement traditionnel de l’Église contenu dans l´article 2267 du catéchisme. Cette déclaration quelque inopportune dans le contexte d´un congrès consacré aux avancées réalisées vers l’abolition universelle de la peine capitale contrastait fortement avec le message de Benoît XVI lu en liminaire de la rencontre et du congrès précèdent où le Vatican qualifiait la peine de mort de « signe de désespoir » et soulignait son abolition « comme une partie intégrante de défense de la vie humaine à tout âge » .

L´ACAT Allemagne s’adressait alors en mars 2010 au Nonce apostolique à Berlin pour lui faire part de ses préoccupations au regard de cette dernière déclaration.

En juillet 2011 un nouvel catéchisme à l’usage de la jeunesse (YOUCAT) était publié. Dans le libellé de l´article 381 : Pourquoi l’Église est-elle contre la peine de mort ne contient pas une interdiction générale de la peine de mort mais au contraire laisse une porte ouverte aux gouvernements pour qui la peine de mort pouvait être prononcée. La FIACAT avec les ACAT Luxembourg, Suisse et Allemagne demandaient aux présidents des Conférences épiscopales d’Allemagne, d’Autriche et de Suisse que l´article 381 du Youcat dans sa disposition sur la peine de mort prononce une interdiction claire de son application.

Un collaborateur de la Conférence des Évêques d´Autriche nous répondait que notre souhait serait transmis aux auteurs du Youcat comme au dicastère romain compétent.

Le secrétariat de la Conférence des Évêques allemands écrivait que l’Église s’engage contre la peine de mort parce que cette dernière est aussi cruelle qu´inutile, en citant Jean Paul II.

La même année, une délégation de l’ACAT-Luxembourg était reçue par l’archevêque de Luxembourg, pour s’entretenir avec lui ce thème dans ce catéchisme pour jeunes, qui reprenait les termes du catéchisme “pour adultes”. L’ACAT souhaitait connaître son avis sur ce point fondamental et lui demandait d’intervenir, en tant qu’autorité pastorale, auprès des personnes compétentes au Saint Siège. Mgr Hollerich tenait alors à exprimer son entière solidarité avec l’ACAT sur le refus en toutes circonstances de la peine capitale . Cependant, il ne donnait aucune assurance quant aux résultats de son intervention précisant que « la voix d’un petit archevêque de Luxembourg vaut peu de choses dans les hautes sphères de l’Église » !

Les années qui suivirent furent l’occasion pour la FIACAT de plusieurs entretiens à Rome avec les cardinaux responsables des dicastères Conseil pontifical justice et Paix et le Conseil pour la promotion de l’Unité des chrétiens ainsi qu´avec le cardinal à la tête de la secrétairerie d´État. Chaque fois la FIACAT demandait une modification du libellé de l´article 2267 du catéchisme universel et de celui de l´article 381 du YOUCAT.

Mais manifestement, la contradiction entre le magistère de l´Église catholique qui proclame haut et fort le respect de la dignité inhérente à toute personne humaine et la licéité de la peine capitale du catéchisme n’était manifestement pas sujet de préoccupation pour les autorités vaticanes, qui considéraient que les textes de l´Église aussi bien les déclarations papales comme les prises de positions claires et résolues des conférences épiscopales suffisaient à donner une image abolitionniste du Saint Siège.

En septembre 2015, la FIACAT envoyait un courrier au Pape lui demandant de condamner la peine de mort au cours de son voyage aux USA, ce qu’il fit aux Nations Unies comme devant le Congrès américain.

Aujourd’hui les dernières ambiguïtés du guide de foi de la doctrine de l’Église catholique sont enfin dissipées. Nous pouvons nous en réjouir et en remercier le Pape François.

L´article 2267 aujourd’hui en vigueur est plus qu’une simple condamnation de la peine capitale qui « lèse lourdement la dignité humaine », selon les termes même du Pape François, c´est aussi une parole radicale sans équivoque d´une Église qui se veut abolitionniste et qui appelle ses fidèles à suivre ce chemin.

La tendance abolitionniste progresse d´une façon significative dans le monde., mais ce combat est loin d´être terminé. Certes, plus de 2/3 des États ont aboli, en droit ou en fait, la peine de mort. Mais il demeure que 23 pays ont procédé à des exécutions en 2017. Et parmi eux les plus grands, comme les États-Unis et la Chine (7).

En Europe, des voix s´élèvent pour réclamer le rétablissement de ce châtiment devant l’insécurité qu´engendrent les actes terroristes. Quelques pays sont même déjà prêts à la remettre en vigueur pour sanctionner certains crimes (8).

La parole abolitionniste forte que l’Église vient de formuler dans son catéchisme ne peut que renforcer sa crédibilité dans le combat qu´elle veut mener pour le respect de la vie humaine.

Aujourd’hui un pas de plus pourrait être envisagé par l´État du Vatican, nous semble-t-il : son adhésion au deuxième protocole se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Rien ne s´y oppose plus. Son autorité morale ne pourrait qu’en être renforcée. Et c´est bien sûr le souhait que nous formulons au regard de notre foi chrétienne.

Bernadette Jung, présidente de l’ACAT-Luxembourg de 1998 à 2005 , membre du bureau international de la FIACAT de 2004 à 2016.

(1) La nouvelle formulation en langue française, en date du 1er aout 2018, a été rectifiée par la congrégation pour la doctrine de la foi, quelques jours plus tard, afin d´être plus conforme aux propos du Pape François . Le texte initial parlait d’une mesure inhumaine qui blesse la dignité personnelle ».

(2) Dans sa version de 1998.

(3) La FIACAT est membre fondateur de la Coalition mondiale contre la peine de mort, elle est aussi membre du comité de pilotage ; un certain nombre d’ACAT sont aussi membres comme l´ACAT France, l´ACAT Deutschland.
Voir aussi l’évaluation externe du programme de la FIACAT sur l’abolition de la peine de mort en Afrique mené conjointement par la FIACAT et des ACAT avec la Coalition mondiale contre la peine de mort de 2015 à 2018.

(4) Il s´agissait de Guy Aurenche, président de la FIACAT, avec la présidente de l’ACAT Italie et celle de l’ACAT-France, protestante accompagnée des vice-présidents catholique et orthodoxe.

(5) Voir la prise de position de la FIACAT dans FIACAT Infos N°14 oct.nov.déc.1991 et le communiqué de l’ACAT Luxembourg du 15 décembre 1992.

(6) « La légitime défense peut être non seulement un droit, mais un devoir grave, pour celui qui est responsable de la vie d’autrui, du bien commun de la famille ou de la cité. Préserver le bien commun de la société exige la mise hors d’état de nuire de l’agresseur. A ce titre l’enseignement traditionnel de l’Église a reconnu le bien-fondé du droit et du devoir de l’autorité publique légitime de sévir par des peines proportionnées à la gravité du délit, sans exclure dans des cas d’une extrême gravité la peine de mort. Pour des raisons analogues, les détenteurs de l’autorité ont le droit de repousser par les armes les agresseurs de la cité dont ils ont la charge… »

(7) voir l´état des lieux sur le site de la Coalition mondiale contre la peine de mort : www.worldcoalition.org

(8) Par exemple: en Turquie, le président Recep Tayyip Erdogan a évoqué la possibilité du rétablissement de la peine de mort suite au coup d’État manqué de 2016 ; aux Philippine le président Duterte veut rétablir la peine de mort pour lutter contre les crimes liés à la drogue.

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