Action février-mars 2021

Pour la libération immédiate du défenseur des droits humains ouïghour Ilham Tohti, lauréat du prix Sakharov 2019.

Pour un engagement sans équivoque de la part de l’UE en faveur du respect des droits humains dans la région autonome du Xinjiang, en Chine.

CHINE - Xinjiang

Février-mars 2021

Avec la publication des « China Cables » en novembre 2019, les preuves de l’internement forcé systématique de plus d’un million de personnes appartenant à la minorité musulmane des Ouïghours dans la Région autonome du Xinjiang ont apparu au grand jour. Le Parlement européen a réagi à ces atteintes flagrantes aux droits humains par sa résolution du 19 décembre 2019 sur la situation des Ouïghours et sa résolution du 17 décembre 2020 sur le travail forcé au Xinjiang. Le 18 décembre 2019, Jewher Ilham, en lieu et place de son père Ilham Tohti emprisonné depuis 2014, s’est vu remettre le prix Sakharov au Parlement européen à Strasbourg.

La situation des Ouïghours

En 1949, la région appelée « Turkestan oriental » fut occupée par la Chine, tout comme le Tibet en 1950, portant désormais le nom de Région autonome du Xinjiang. Avec une superficie de 1.665.000 km2, le Xinjiang est situé à l’extrême Nord-Ouest de la République populaire de Chine et revêt une importance capitale du point de vue géopolitique et géostratégique : le Xinjiang a une frontière commune avec six pays, dispose d’importantes ressources naturelles et a son rôle à jouer dans le cadre du projet gigantesque de la nouvelle route de la soie, lancé par Xi Jinping.

Dès le départ, il y a eu des mouvements répétés de résistance contre l’hégémonie chinoise. Par une politique de colonisation ciblée, la Chine a réussi jusqu’en 2019 à accroître la part des chinois han à 40% de la population musulmane ouïghoure, sur une population totale d’environ 29,6 millions d’habitants.

Depuis les événements du 9/11, la Chine essaie de faire valoir l’oppression croissante de la minorité musulmane et la répression des poussées séparatistes comme autant d’efforts de lutte contre le terrorisme islamiste international. En 2009 il y a eu des protestations contre l’oppression croissante. Au moins 197 personnes ont perdu la vie suite à l’intervention violente des forces de sécurité chinoises, des centaines furent blessées. Il y a eu par la suite plusieurs attentats spectaculaires revendiqués par une organisation islamique ouïghoure séparatiste.

En mai 2014, le gouvernement chinois lance la « campagne coup de poing contre le terrorisme violent ». En 2016, Chen Quanguo est nommé secrétaire du Comité du Parti communiste chinois pour le Xinjiang, homme tristement célèbre pour ses actions brutales à l’encontre de la population tibétaine lors de son mandat précédent au Tibet. À partir de ce moment, la répression des Ouïghours devient totale: surveillance permanente et sans faille des Ouïghours dans tous les domaines de leur vie à l’aide des technologies de surveillance les plus évoluées, interdiction des pratiques culturelles et religieuses exercées en public autant qu’en privé, interdiction des rassemblements, détention arbitraire dans des camps d’internement de masse sanctionnant toute transgression aussi minime fût-elle, mauvais traitements et torture à l’intérieur des camps, travail forcé en-dehors des camps, stérilisations forcées, avortements forcés. La liste des violations flagrantes des droits humains est longue.

Dans sa lettre à Xi Jinping, l’ACAT appelle à la libération immédiate d’Ilham Tohti, professeur d’économie et défenseur des droits humains, qui jusqu’à son arrestation n’a cessé de s’engager pour le dialogue et l’entente entre les Ouïghours et les autres communautés ethniques en Chine.

La deuxième lettre s’adresse à Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité; copie de l’appel à Xi Jinping est à joindre pour information. La lettre demande à M. Borrell d’intervenir en faveur de la libération d’Ilam Tohti et de veiller avec fermeté à faire valoir le respect des droits humains dans le cadre de futures négociations avec la Chine.

Traduction de la lettre adressée à Josep Borrell

Monsieur le Haut Représentant / Vice-Président,

Veuillez trouver ci-joint une copie de la lettre que j’ai adressée au Président Xi Jingping de la République populaire de Chine en soutien à M. Ilham Tohti, universitaire ouïghour bien connu, qui est en détention depuis 2014 et qui purge une peine d’emprisonnement à perpétuité pour engagement séparatiste. Dans le cadre d’une campagne lancée par l’ACAT-Luxembourg, je me permets de vous demander d’intensifier l’action de l’UE en faveur d’Ilham Tohti, qui s’est vu décerner le prix des droits de l’homme Vaclav Havel et le prix Sakharov pour la liberté de l’esprit en 2019, et de dénoncer la situation effroyable des droits humains au Xinjiang.

J’ai été consterné d’apprendre à quel point la Chine intensifie sa campagne d’internement massif et d’assimilation politique et culturelle forcée contre les Ouïghours de la région et d’autres groupes ethniques à majorité musulmane. On estime à plus d’un million le nombre de personnes qui se trouvent dans des camps de détention en masse et de travaux forcés, que les autorités chinoises qualifient de «camps de rééducation et de formation professionnelle». L’U.E. doit prendre toutes les formes d’action possibles pour faire en sorte que les autorités chinoises cessent de pratiquer cette politique de violations systématiques des droits humains. Comme vous l’avez répété à maintes reprises, le respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit constitue le fondement de la politique de coopération internationale de l’Union européenne. L’amélioration des relations commerciales avec la Chine ne doit pas se faire au détriment des droits fondamentaux des personnes. Je suis gravement préoccupé par la perspective de voir ces considérations reléguées au second plan par la volonté actuelle de faire aboutir l’Accord global UE-Chine sur l’investissement.

Je vous exhorte donc :

–    à appeler les autorités chinoises à libérer immédiatement et sans condition Ilham Tohti et tous les autres militants des droits de l’homme détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leur liberté d’expression, et à fermer les camps de rééducation,

–    à insister pour que le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme soit autorisé à se rendre au Xinjiang et, en particulier, à accéder sans entrave à tous les camps de détention de la région,

–    à interdire les produits fabriqués dans les camps de rééducation chinois sur les marchés de l’U.E.,

  • à exercer une pression constante sur les autorités chinoises au plus haut niveau pour qu’elles honorent leur engagement récent à « déployer des efforts continus et soutenus » en vue de la ratification de toutes les conventions fondamentales de l’OIT sur le travail forcé,
  • à donner suite, de toute urgence, aux autres demandes formulées dans les résolutions du Parlement européen du 19 décembre 2019 et du 17 décembre 2020 sur la situation des Ouïghours dans la Région autonome de Xinjiang.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Haut Représentant / Vice-Président, l’assurance de ma haute considération.

 

Action terminée