Myanmar : Violations massives des droits humains

La situation des droits humains au Myanmar

Le 1er février 2021, quelques mois après les élections législatives remportées par la Ligne nationale pour la démocratie (LND) – le parti à la tête du pays depuis 2015 – la junte militaire birmane, qui contestait ce résultat, a mené un coup d’État pour s’emparer du pouvoir. Le Myanmar vient d´entrer dans sa 3ème année de guerre civile. L’arbitraire et la violence y règnent. Et l´état d´urgence vient d´être prolongé pour 6 mois.

Les populations civiles, victimes de violations massives et systématiques des droits humains

Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU a dressé, fin janvier, un bilan accablant de deux années de répression : villages bombardés ; cliniques, écoles, lieux de culte incendiés ; 1,2 million de personnes déplacées par les combats ; 16 000 arrestations pour des motifs politiques ; reprise des exécutions après plus de trente ans de moratoire … Dans le même temps, l’extrême pauvreté s’accroît, un quart de la population environ souffrent de carence nutritionnelle.

Nombreuses sont les exactions commises par la junte : tueries de masse, arrestations et détentions arbitraires, pratique de la torture, recours aux violences sexuelles, attaques dans des zones de conflits, persécution systématique des membres de la minorité rohingya…
Le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, créé en septembre 2018 par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour recueillir des éléments de preuve attestant de la commission de crimes internationaux les plus graves et de violation du droit international, a déclaré en octobre 2022 qu’il existait « un nombre croissant d’éléments indiquant que les crimes de guerres et les crimes contre l’humanité s’intensifient » au Myanmar. Ce constat souligne la situation extrêmement préoccupante des droits humains dans le pays.

Depuis le coup d’État de février 2021, l’ONG locale Assistance Association for Political Prisoners (AAPP) a comptabilisé 17 404 arrestations de prisonniers politiques, 15 883 toujours détenus et 2 796 qui ont été tués par la junte lors de répressions organisées suite à des mouvements pro-démocratie.

La peine de mort : outil de persécution, d’intimidation et de harcèlement

En juillet 2022, l’armée a procédé à quatre exécutions d’opposants politiques, une première en trente ans environ : jusqu’alors, le pays était considéré comme abolitionniste de fait. D’autres condamnations ont été prononcées depuis. À la date du 2 décembre 2022, l’ONU estimait que, depuis le coup d’État, plus de 130 personnes avaient été condamnées à mort par des tribunaux militaires. l’AAPP, quant à elle, fait état à ce jour de 144 condamnations à mort et de 103 condamnés dans les couloirs de la mort.

Il se pourrait que ces chiffres soient en-dessous de la réalité : cette évaluation se heurte au secret et à l’opacité de ces procédures, d’autant que ces condamnations sont prononcées à l’issue de procès injustes et sommaires, en violation des standards internationaux sur le procès équitable. La peine de mort est utilisée par la junte comme outil de persécution, d’intimidation et de harcèlement de tous ceux qui osent s’opposer aux autorités.

À l’échelle internationale, la Birmanie n’a pris aucun engagement sur la question de la peine de mort. L’État n’a pas signé le Pacte international sur les droits civils et politiques (PIDCP), ni le deuxième protocole facultatif s’y rapportant, lequel vise spécifiquement à abolir la peine de mort. En ce qui concerne plus largement la torture, le Myanmar n’a pas signé la Convention contre la Torture. Toutefois, le 15 décembre 2022, à contre-courant de cette absence d’engagement, le Myanmar a voté pour la première fois en faveur d’un moratoire sur la peine de mort lors du vote pour la 9ème résolution pour un moratoire sur la peine de mort alors qu’elle s’était précédemment abstenue. Une prise de position à considérer toutefois avec prudence, en ce qu’elle pourrait être seulement l’expression d’une manœuvre diplomatique ou politique.

La responsabilité de la communauté internationale est engagée

De nombreux États et organisations internationales ont régulièrement condamné les violences et la terreur exercée par la junte envers le peuple birman. Le 21 décembre 2022, le Conseil de sécurité des Nations-Unies a même adopté une résolution historique sur le Myanmar exigeant “l’arrêt immédiat de toutes les formes de violence” dans l’ensemble du pays, demandant instamment à l’armée de “libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement” et encourageant la communauté internationale “à soutenir la mise en œuvre du consensus en cinq points établi le 24 avril 2021 par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN)” dont le Myanmar est membre. Sur ce dernier point, cette résolution fait référence au consensus en cinq points adopté par l’ASEAN sur la crise au Myanmar, afin de faire cesser les violations des droits humains dans le pays, en cohérence avec les principes et engagements de cette Association. Ceux-ci exigent: “l’arrêt immédiat des violences dans le pays ; la retenue ; la mise en œuvre d’un dialogue constructif entre toutes les parties concernées “pour servir de médiateur afin de promouvoir le processus de dialogue et la fourniture d’aide humanitaire au peuple du Myanmar par l’intermédiaire du Centre de coordination de l’aide humanitaire de l’ASEAN”. La junte n’en a respecté aucun : ni les condamnations répétées, ni les déclarations des Nations unies, ni les engagements pris avec d’autres États ne l’arrêtent.

En fin d’année 2022, le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a déclaré que la communauté internationale avait “échoué” au Myanmar. Le 22 décembre 2022, le Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme au Myanmar a préconisé, au lendemain de l’adoption de la résolution du Conseil de sécurité susmentionnée, “des options viables pour les États membres qui sont prêts à faire face à cet échec, y compris la coordination des sanctions, la coupure du flux de revenus qui finance les assauts militaires de la junte, un embargo sur les armes et les technologies à double usage et une aide humanitaire robuste qui peut atteindre ceux qui en ont le plus besoin, entre autres mesures”, soulignant l’importance de “la volonté politique de les mettre en œuvre”.

Ce que nous demandons :

Monsieur le Secrétaire général, je m´adresse à vous en tant que haut représentant de l´ASEAN afin que, face à la répression sanglante de la junte militaire, les États membres de votre Association fassent de la protection des droits humains et des libertés fondamentales au Myanmar une priorité de leurs actions, conformément à la Charte de l’ASEAN.
Il est urgent qu´ils exigent de la junte militaire au pouvoir :

  • la cessation immédiate des exécutions capitales et un retour au moratoire sur la peine de mort,
  • la libération immédiate de toutes les personnes détenues ou passibles d´emprisonnement pour avoir exprimé pacifiquement leur opinion,
  • la cessation de l´état d´urgence,
  • le libre accès au pays des organisations humanitaires prêtes à apporter aide et assistance aux populations dans le besoin.

Sources : ACAT France ; Human Rights Watch ; Amnesty International ; Assistance Association for Political Prisoners


La lettre est adressée à

Dr Kao Kim Hourn
Secretary-General of the Association of Southeast Asian Nations (ASEAN)
70A, Jalan Sisingamangaraja
12110 JAKARTA
INDONESIA

Timbrez à 1.75 €

Copie à l’ambassade

Embassy of the Republic of the Union of Myanmar,
Boulevard General Wahis 9, 1030 Schaerbeek, Belgium

Timbrez à 1.40 €

N’oubliez pas : vos nom, prénom et adresse, la date et votre signature.
Ecrivez avant le 31 mars 2023