Mineurs en prison au Luxembourg

Mineurs en prison, la question divise toujours

La Médiateure du Luxembourg, Claudia Monti, dénonce le maintien au Centre pénitentiaire du Luxembourg de détenus mineurs, depuis l’ouverture de l’Unité de sécurité pour mineurs.

Le Parquet réplique.

Article actualisé le 26 février 2018

La Médiateure Claudia Monti publie une seconde lettre ouverte en réponse au Parquet

Le 26 février 2018, Madame la Médiateure a publié une seconde lettre ouverte afin de préciser sa position et de « recentrer le débat« , après la réaction du Parquet à sa première lettre du 21 février.

Elle insiste sur l’importance de placer les mineurs dans des infrastructures adaptées à leurs besoins spécifiques, « ceci notamment dans l’optique d’une maximisation des chances d’une future réinsertion sociale et donc d’une prévention de la récidive« . Elle revient sur le fait que ces infrastructures existent désormais et rendent injustifiable tout placement de mineur en Centre pénitentiaire pour adultes. Loin de nier le bien-fondé de placer en centre fermé les « mineurs ayant commis des faits pénalement répréhensibles en droit commun« , elle précise qu’il n’est pas question ici de la nature des faits commis mais du principe général à respecter.

Elle explique également, de manière claire, le choix du Luxembourg de s’être doté d’un système de « legislation sur la protection de la jeunesse et non d’un code pénal de la jeunesse comme c’est le cas dans d’autres pays« . Dans cette optique, » l’esprit de la protection de la jeunesse estime en effet qu’un mineur qui commet des faits punissables a besoin d’une assistance ou d’une aide professionnelle afin de le réorienter et de l’intégrer utilement dans la société. Cette assistance peut évidemment aussi avoir un caractère coercitif tel qu’un enfermement à l’UNISEC. Les mots d’ordre resteront réinsertion et prévention de la récidive. »

Elle conclue sur un argument secondaire mais qui a également sa valeur : pour des raisons purement budgétaires, il est naturellement préférable de recourir aux infrastructures mises en place à grands frais plutôt que de continuer à générer des coûts supplémentaires pour adapter le CPL au placement de mineurs.

 

Vous trouverez ci-dessous la seconde lettre ouverte de Madame la Médiateure Claudia Monti, chargée du contrôle externe des lieux privatifs de liberté, en date du 26 février 2018

Première lettre ouverte de la Médiateure Claudia Monti

Le 21 février 2018, Madame la Médiateure a publié une lettre ouverte dans laquelle elle dénonce le maintien au CPL (prison du Luxembourg) de détenus mineurs, alors même que l’Unité de sécurité pour mineurs (UNISEC) a été mise en fonction le 1er novembre 2017. Cet état de fait grave est rendu possible par une situation tout aussi consternante : l’UNISEC a été construite puis mise en service sans que les textes législatifs en réglementant le fonctionnement n’aient été votés.

La conception de l’UNISEC est pourtant une histoire de longue haleine, dans laquelle l’ACAT a joué son rôle: en 1992, c’est en effet notre association qui dénonçait auprès du CPT (Comité européen pour la prévention de la torture) la détention des mineurs avec les détenus adultes dans l’unique prison du Luxembourg, dans des conditions déplorables et contraires aux traités internationaux ratifiés par le Luxembourg, en l’absence d’une structure adaptée. Depuis, nous n’avons eu de cesse de dénoncer cet état de fait et la lenteur des mesures prises par le gouvernement luxembourgeois, dans tous les rapports que nous avons publiés, pour le CPT ou pour le Conseil des droits de l’homme de l’ONU lors des Examens périodiques universels, dont le dernier en date de janvier 2018. Nous sommes également intervenus à plusieurs reprises sur cette question auprès du Comité contre la torture (CAT).

Nous ne pouvons que nous réjouir de la prise de position de Madame la Médiateure, très détaillée et ferme. Elle explique et démonte les arguments des partisans d’une possibilité de maintenir certains mineurs dans la prison pour adultes dans certains cas, certes limités et clairement définis (notamment quand la dangerosité des mineurs concernés menacerait la sécurité des autres détenus). Selon elle, l’UNISEC est parfaitement conçu pour faire face à ce genre de situation, et la séparation des mineurs et des adultes ne devrait souffrir aucune exception.

Vous trouverez ci-joint la première lettre ouverte de Madame la Médiateure Claudia Monti, en date du 21 février 2018

Vous trouverez la réaction du Parquet général du Luxembourg, en date du 22 février 2018, en suivant le lien ci-dessous.

Communiqué du Parquet général

Le 22 février 2018, le Parquet général du Luxembourg a publié un communiqué en réponse à cette lettre ouverte de la Médiateure.
Il y détaille et justifie la situation actuelle en se plaçant du point de vue de la loi, encore lacunaire sur la question comme nous l’avons déjà signalé. Selon le Parquet, la justice luxembourgeoise n’a procédé à aucun placement de mineurs au CPL depuis l’ouverture de l’UNISEC et les deux mineurs qui y sont encore détenus à l’heure actuelle présenteraient les conditions de dangerosité rendant « acceptable » leur incarcération dans une prison pour adultes.

Nous pouvons toutefois relever que le Parquet tente de se défausser des accusations de la Médiateure en arguant de la nécessité de priver de liberté les mineurs condamnés pour des crimes et délits, ce que la Médiateure ne nie à aucun moment. Elle ne fait que souligner le paradoxe d’une situation où tout est prévu et mis en place pour respecter dans les meilleures conditions les recommandations européennes et internationales en matière de détention de mineurs, mais où la Justice semble récalcitrante à utiliser les moyens mis à sa disposition.

La réactivité du Parquet semble malgré tout de bon augure, démontrant la sensibilité de la Justice à cette mise en accusation et nous permettant d’espérer qu’elle prendra rapidement les mesures définitives que nous attendons depuis plus de 25 ans…

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